Rencontre avec …
Valérie PEDEZERT | Artiste plasticienne
Un point c’est tout
En cherchant à nommer les créations réalisées au stylo bille par Valérie Pédezert, on pense à Entité, à Monade, à Bindu, par exemple. Une Entité, Chose considérée comme un être ayant son individualité. Une Monade, Substance inétendue, imperméable à toute action du dehors, mais subissant des changements internes obéissant aux principes d’appétition et de perception et qui constitue l’élément dernier, le plus simple, des êtres et des choses, pour Leibnitz, et le Bindu, chers aux adeptes de Shiva, est ce point à partir duquel se déploie et s’absorbe l’Univers et que chacun, par le yoga, peut expérimenter.
Ce sont là des références, et puis vient la rencontre avec ces créations. Elles semblent si calmement, intensément autonomes, ou bien en lente phase de concentration, des trous noirs encore visibles qui se gorgent lentement de lumière, se densifient sans jamais se durcir, filtrent le vivant pour Dieu sait quel élixir, quelle essence de l’exister, elles ont leur propre logique de développement et ne rendent de compte à personne, on est admiratif et envieux de leur force d’être, singulières, incomparables, elles dont on ne sait si elles absorbent ou diffusent leur énergie.
Les organes d’un corps inconnu, les éléments primordiaux, antérieurs au monde avant son apparition, ces créations, ces créatures se tiennent là, en leur vie propre, tellement au présent qu’on en oublie qu’elles sont nées de quelque part et de quelqu’un. Alors on essaye d’imaginer comment Valérie Pédezert a engendré leur existence, point par point, en se laissant peut-être flotter dans leur intérieur dépourvu de centre, en transfusant ses humeurs et ses fluides de sensation dans une forme circonscrite mais dont les limites sont encore mobiles et sensibles. A se tenir face à un de ses dessins, on sait que cette fabricante de talismans touche sa bille.
Denis Decourchelle.